Quelques mythos sur le porno à relativiser (ou pas)

Si le porno transformait ses adeptes en psychopathes décérébrés et violents, on vivrait tous dans un épisode sans fin de Walking Dead. Bonne nouvelle : on n’en est pas encore là.

  • 15.07.21
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Quelques mythos sur le porno à relativiser (ou pas)

Tous les jeunes sont addicts au porno

A en croire les médias, le porno serait banalisé chez les jeunes, au point qu’ils seraient incapables de décrocher. En fait, ces conclusions relèvent plus d’un fantasme de boomers que de la réalité. D’abord, les hommes et les femmes ne sont pas exposés au porno de la même façon : d’après cette étude (1), 30% de jeunes femmes de 18 à 34 ans regardent du porno une fois par semaine, contre 80% de jeunes hommes, et parmi eux, seuls 15% en regardent tous les jours. Ensuite, les scientifiques ne s’entendent pas sur la nature ni sur la mesure de l’addiction au porno. Certains (2) affirment même qu’elle n’existe pas, contrairement à l’addiction à l’alcool ou aux drogues, parce que les effets ne sont pas comparables. Et même si on admet que l’addiction au porno existe, elle ne concernerait que 5% des hommes consommateurs quotidien de porno, et 3% des femmes (3) âgés de moins de 30 ans. Le porno n’est donc pas un pangolin, et la pandémie est encore loin…

Le porno n’est donc pas un pangolin, et la pandémie est encore loin…

La consommation de porno a explosé pendant les confinements

Cédric O, le secrétaire d’Etat au numérique, annonçait sur France Info (4) que la fréquentation de sites pornos avait bondi de 50% en mars 2021. Mais d’après les chiffres officiels (5) de PornHub, cette augmentation serait plutôt de 20%, et elle est surtout due à une promo marketing exceptionnelle au début du confinement, qui permettait aux abonnés d’accéder gratuitement à la partie payante du site. D’après les données de Google trends et quel que soit leur genre ou leur âge, le Covid n’a pas eu d’influence sur les recherches des Français en matière de porno.

Plus on regarde du porno, moins on a de relations sexuelles

Ce qui est certain, c’est que la plupart des gens consomment du porno seuls (surtout les hommes), et que c’est la génération qui en consomme le plus qui baise le moins : une étude (6) indique ainsi que sur la période 2000-2002, 9,5% des 18-44 ans n’avaient eu aucune activité sexuelle, une proportion qui a presque doublé en moins de vingt ans. Mais cette baisse de l’activité sexuelle est moins due au porno en lui-même qu’à la généralisation du divertissement solo sur écran individuel (réseaux sociaux, streaming, jeux vidéos…). Bref, Netflix ou Instagram sont aussi responsables que le X.

Le porno est inégalitaire et dégradant pour les femmes

Ça, ça n’est pas nouveau mais c’est de plus en plus vrai, en tout cas dans le porno mainstream où l’on rivalise de pratiques hardcore - toujours au détriment des femmes - pour se démarquer de la concurrence. Mais en réalité, le porno n’est pas « mauvais » ou « dangereux » en tant que tel, ce sont les stéréotypes sexistes et aussi homophobes, racistes, âgistes, grossophobes etc. qui le sont. Ceux-ci existent en-dehors du porno, et ce sont eux qu’on doit combattre en priorité pour renouveler son imaginaire érotique.

Pour en savoir plus

(1) YOUGOVE.COM - Les Millenials Sexualité et pornographie

(2) TOPSANTE.COM - La dépendance au porno n'existe pas

(3) SANTE.LEFIGARO.FR - Ces femmes addicts au porno

(4) FRANCETVINFO.FR - Coronavirus : la consommation de sites pornographiques a "augmenté de 50%", selon le secrétaire d'Etat chargé du Numérique

(5) LEMONDE.FR - Confinement et pornographie : le pic fantasmé de la consommation en France

(6) GQMAGAZINE.FR - Selon une étude, nous avons moins de relations sexuelles à cause du streaming et des jeux vidéos